Le 51ème Régiment de Mitrailleurs d’ Infanterie Coloniale a été formé le 22 août 1939 à la mise sur pied du dispositif de couverture de la ligne Maginot à partir des éléments du 1er bataillon du 41ème RMIC du temps de paix en garnison à Sarralbe.
Il occupe le sous-secteur de Sarralbe, de Schweix à Herbitzheim, sur un front de 12 kilomètres environ, s’appuyant sur le système d’inondations défensives des vallées de l’Albe et de la Sarre.
De « l’Opération Sarre » à la « Drôle de guerre »
Après la mobilisation, le deuxième bataillon du 51ème RMIC participe début septembre 1939 au soutien des détachements de la IVème Armée au Sud de Forbach lors de « l’ Opération Sarre ». Fin septembre, le II/51ème RMIC revient sur ses positions et prend part alors avec l’ensemble du régiment aux travaux de fortification de la position. Ces aménagements se poursuivent sans relâche durant toute la « Drôle de Guerre » en dépit d’une météo défavorable, d’une période de froid intense et de la réorganisation des unités de l’Armée et du Corps d’Armée.
Combats en mai 1940
Dans la zone de couverture de la 4ème Armée, l’opération « Torche » ( Fackel ) contre la ligne Maginot vise le secteur entre Sarre et Rosselle. Elle est déclenchée le 12 mai, dimanche de Pentecôte, soit 2 jours après le début de l’attaque allemande contre les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg.
Le 12 mai les Allemands s’emparent de la ligne de surveillance française et viennent éprouver la défense de la position de couverture.
Les 13 et 14 mai, au contact de cette position, les Allemands portent en vain tous leurs efforts sur le couloir de la Rosselle.
A partir du 15 mai, il n’y a plus d’attaque générale sur la position de couverture, mais encore quelques tentatives d’infiltrations. Les Français poursuivent le retrait de leurs divisions en avant de la ligne principale de résistance et petit à petit, l’ennemi occupe le terrain abandonné.
Après ce repli les régiments de la ligne principale de résistance doivent assurer leur propre protection. Pour se faire, ils reconstituent les corps francs, qui, de part leur mobilité peuvent renseigner le commandement sur la situation dans le no man’s land qui s’étend en avant des positions.
Ils font également occuper les avant-postes sur les principales voies d'accès à la ligne principale de résistance.
Les Avant-Postes
Situés sur les axes de pénétration donnant accès à la ligne principale de résistance, à environ 2 kilomètres en avant de celle-ci, les Avant-Postes ont pour mission de déceler l'approche de l'ennemi, donner l'alerte et briser son premier assaut.
Organisation des positions
Ce sont des points d’appui fermés, encore appelés « bouchons » composés de 2 à 3 blockhaus armés d'un canon antichar, 1 ou 2 mitrailleuses et de fusils mitrailleurs. Ces blockhaus sont généralement recouverts d’un toit en tuiles et les créneaux fermés par des volets en bois leurs donnant l’apparence d’une maison d’habitation. Un cantonnement léger situé à proximité permet d’abriter les soldats qui viennent occuper la position à tour de rôle.
Le dispositif est renforcé par différents obstacles:
- des barrières de route antichar.
- des rails antichar.
- des réseaux de barbelés.
- des mines antichar et antipersonnel
Le dispositif est complété par des destructions préparées devant rendre inutilisables les voies d'accès (carrefours, routes, ponts).
Le poste avancé de Willerwald est situé au Nord de la localité et contrôle l’axe routier Sarreguemines-Sarralbe.
Un autre poste avancé occupé par les marsouins du 51ème RMIC se trouve au Nord de Herbitzheim, devant la maison forestière de Wackenhuebel, dans le bois de Kisswald sur l'axe Sarreguemines - Herbitzheim.
Attaque des avant-postes début juin 1940
Dès la fin du mois de mai, les Allemands entreprennent la conquête systématique des avant-postes de la ligne principale de résistance dans la Trouée de la Sarre, ainsi que des points d’observation leur permettant d’avoir une vue sur les positions françaises.
Sur le front du 51ème Régiment de Mitrailleurs d’Infanterie Coloniale les accrochages entre patrouilles deviennent de plus en plus nombreux.
Le 3 juin, les marsouins du 51ème RMIC montent une reconnaissance offensive au Nord de Willerwald. Cette action fait des victimes de part et d’autre mais permet aux soldats français d’identifier les unités allemandes qui débouchent de la direction de Sarreguemines.
Le 4 juin, le groupe franc Hénard rencontre l’ennemi dans le Petit Hambach ; il lui inflige des pertes mais, menacé de débordement, doit se replier. L’ennemi occupe alors la crête au Nord de Willerwald et domine le poste avancé qui est dans le fond en contrebas. Son artillerie commence à bombarder Willerwald. Conformément aux instructions du colonel Dagnan, le commandant du sous-secteur prépare l’évacuation du poste. Le repli du matériel et de la garnison ainsi que l’évacuation du village par les soldats français s’effectuent sans incidents dans la nuit du 4 au 5. Les installations du poste de Willerwald sont détruites.
Le 5 au matin, l’ennemi occupe le village de Willerwald et prend contact avec les hommes de la CM 1 du capitaine Gontherot en position sur l’éperon au Sud du village. Les Allemands placent des observateurs dans le clocher du village, observatoire vu à 15 kilomètres à la ronde et qui domine toute la position. Sa destruction mainte fois réclamée n’a pas été réalisée par le génie. Elle est demandée cette fois à un groupe de 155 du 217ème Régiment d’Artillerie. Coup après coup, les 155 neutralisent le clocher et finissent par le décapiter.
Le 6, l’artillerie française poursuit ses tirs sur le bois et le village de Willerwald où l’ennemi se prépare à un nouveau bond. Le commandant du sous-secteur décide de ne pas exposer plus longtemps la CM1 à une perte de matériel qui pourrait avoir des conséquences irréparables pour la défense de la position de résistance. Dans la nuit du 6 au 7, la compagnie du capitaine Gontherot, repliée sur l’usine Solvay est relevée à l’éperon de Willerwald par le groupe franc du 1/51ème commandé par le sous-lieutenant Riccio. Le groupe franc a pour mission de faire du volume pour dissimuler le plus longtemps possible à l’ennemi le retrait de la CM1. En cas d’attaque, une manœuvre combinée avec le 1/51ème et l’artillerie est montée par le commandant de sous-secteur. Dès que l’ennemi fera irruption, le sous-lieutenant Riccio lancera une fusée et évacuera au plus vite la position. Une concentration de feu d’un groupe d’artillerie et tous les moyens disponibles du 1/51ème s’abattront sur l’attaque ennemie tandis qu’un barrage de 155 appliqué sur le village les coupera de ses arrières.
Le 7 au soir, vers 21 heures, l’attaque allemande se déclenche. La manœuvre réussit complètement. Le sous-lieutenant Riccio et ses hommes échappant de justesse à l’étreinte ennemie qui débouche de face et sur les deux flancs de l’éperon, dévalent les pentes à toute vitesse. La concentration de mitrailleuses, de mortiers, de 75 et de 155 s’abat sur l’ennemi qui prend la fuite.
Dans la nuit du 7 au 8, une patrouille de reconnaissance française constate que l’éperon au Sud de Willerwald est à nouveau occupé par les Allemands.
L’activité des deux côtés reste intense. Les Allemands poussent en avant leurs moyens et s’organisent pour l’attaque de la position principale de résistance.
Jusqu’au 13 juin, des patrouilles allemandes sont dispersées ou prises à partie par les postes avancés français.
Le 13 juin à 19 heures, le colonel Dagnan communique aux chefs de corps l’ordre d’évacuation de la ligne Maginot pour le lendemain 21 heures.
La bataille du 14 juin : l’Opération TIGER
Déroulement général de l’attaque.
Le 14 juin à 6H30, un bombardement général de l’artillerie allemande s’abat sur les lignes et les arrières français entre Téting et Wittring Plus de 1000 canons ouvrent le feu simultanément. Quand la brume matinale, le brouillard artificiel et les fumées des tirs se dissipent les créneaux des blockhaus, dont beaucoup ne sont pas équipés de leurs cuirassements, sont pris pour cible par les canons antichars (PAK) de petit calibre. Leurs obus de ruptures broient les armes entre les mains de leurs servants, les tuant ou les blessant. Des pièces de défense contre les avions (FLAK) sont également utilisées pour percer les épais murs de béton des casemates alors que les bombes des avions en piqué font vaciller les petits blockhaus et ouvrent des brèches dans les réseaux de barbelés et de rails pour permettre le passage de l’infanterie.
Vers 8h30, quand enfin l’artillerie se tait ou allonge son tir, les bataillons d’assaut, qui durant la nuit s’étaient massés aux lisières des bois face à leurs emplacements de combat, passent à l’offensive. Malgré l’intense préparation d’artillerie, l’assaillant s’aperçoit vite que de nombreux fortins n’ont pas été détruits.
A la mi-journée, aucune avancée significative n’est à enregistrer malgré d’importantes pertes en hommes et matériel. Dans l’après-midi, après une nouvelle intervention massive de l’artillerie et de l’aviation, les fantassins allemands arrivent partout au contact des positions françaises. Cependant aucune pénétration en profondeur ou percée n’est encore possible.
Une victoire française sans lendemain…
Au soir de la bataille du 14 juin, au prix de pertes très élevées, les Allemands n’ont réussi qu’à entamer la ligne principale de résistance, sans parvenir à la rompre. Informé de cet échec, le général von Witzleben est sur le point de changer les plans d’attaque pour le lendemain, quant à 22h15 lui est transmis l’ordre de repli des troupes françaises…
Après une résistance acharnée sur les positions ou au cours des combats liés à la manœuvre de repli effectuée sur ordre du commandement français, les défenseurs de la Trouée de la Sarre succombent à la supériorité numérique et matérielle des Allemands.
Une longue colonne de prisonniers français quitte Willerwald, en direction de Sarreguemines… en route vers les camps de prisonniers en Allemagne...